« Il y eut d’abord des oppida, avec en pièce maîtresse Majargues qui, à plus de 900 mètres d’altitude, contrôlait tous les mouvements de la contrée. Puis virent les Romains, qui s’installèrent en vallée (substructions d’une villa vers la ferme Saint-Vincent) et sans doute sur le coteau (…).
Au haut Moyen-Âge, un habitat se constitua d’abord à Saint-Vincent, autour de la rassurante présence d’un établissement de Templiers, puis monta à l’emplacement actuel où il prit assez d’importance pour participer aux Etats de Provence fin XIVe. Détruit peu après par Raymond de Turenne – en dépit d’une enceinte et d’un château fort -, le bourg se remonta au XVe, mais perdit une deuxième fois son enceinte en représailles de la tentative de résistance à Louis XI (1481) et une troisième fois lors des guerres de religion ; il perdit aussi la moitié de sa population lors de la grande peste mi XVIIe ; et son château à la Révolution…
Le XIXe siècle fut plus heureux, comme le montre une monographie de 1844 (abbé Féraud) où s’affichent les atouts du Limans d’alors : du blé à gros grain, très recherché, des amandiers, des vignes, des oliviers, des mûriers pour nourrir les magnans, des glands qui engraissent les cochons dont le lisier rapporte autant que le blé, enfin le commerce de ces cochons, de moutons et de bovidés.
On connait mal l’origine du nom [du village], Rostaing le pensait d’origine gauloise, tandis que l’abbé Féraud le voyait plutôt venir du limon que la Laye laisse après les crues (…). Qu’importe, le bourg est là, compact et de plan quelque peu anarchique, mais d’une architecture homogène avec des rues étroites rayées par les charrettes, et des maisons à deux niveaux avec entrée à l’étage par pontin couvert ; avec un peu de flair, on identifie le tracé du rempart – un pan face à la route de Forcalquier, puis l’arrondi des rues du Barri et de la Treille – mais moins bien l’emplacement du château.
Limans demeure aussi un petit musée de la vie paysanne, avec des portes cloutées, des meules de moulin, des bancs de pierre, des granges qui sentent bon le fourrage, un bassin qui glougoute dans un jardinet, des chants de coqs et des sonnailles de vaches, et un café (…). »
in Pays de Lure | Forcalquier, Manosque, le pays de Giono,
par Patrick Ollivier-Elliott, Edisud, 2000,
avec leur aimable autorisation.